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Accédants au Royaume-Uni - Le traitement des difficultés

Extrait de la publication de l’ANIL, Habitat Actualité n° 112 au format pdf (26 p., 271 ko).

Le traitement des difficultés des accédants au Royaume-Uni

Contrairement à la France, le Royaume-Uni a déjà fait l’expérience d’une crise immobilière d’ampleur nationale. C’était au début des années 1990, et les conséquences pour les accédants -plus de 75 000 saisies en 1991 et 627 000 ménages en arriérés de paiement en 1992- avaient été d’autant plus dommageables que le filet de sécurité (dispositif de prise en charge du paiement des intérêts d’emprunts des accédants en difficulté) avait perdu une grande partie de son efficacité du fait des mesures restrictives du gouvernement de Margaret Thatcher. Bien que moins brutale que la précédente pour les Britanniques, la crise actuelle se traduit elle aussi par une augmentation du nombre de saisies (40 000 en 2008 contre 27 000 en 2007) et d’accédants en difficulté pour faire face à leurs échéances (219 000 en 2008 contre 130 000 en 2007).

Ces chiffres, très élevés par rapport à la sinistralité française (les statistiques françaises sur ce sujet sont inexistantes - ce qui traduit sans doute le fait que la sinistralité des accédants n’est pas un sujet de préoccupation de premier plan dans notre pays), ont plusieurs causes. En premier lieu, l’accédant britannique est structurellement plus fragile que son homologue français du fait de la part importante des prêts à taux variable non capé et surtout de la pratique courante du refinancement des emprunts et de l’extraction hypothécaire, qui accroît les risques de surendettement. C’est ce qui explique que les prêteurs accordent une attention particulière aux situations de negative equity (qui peut se traduire par valeur nette négative, caractérise une situation où la valeur du bien sur lequel est gagé le prêt est inférieure au capital restant dû), synonyme pour eux de risque de perte, puisqu’en cas de défaillance de l’emprunteur, la vente du bien gagé ne suffit pas à éteindre la dette. En second lieu, les critères d’octroi des crédits se sont relâchés au cours des années récentes et un marché subprime s’est développé jusqu’à représenter 7% des prêts accordés en 2007. Enfin, la crise économique et ses conséquences sur l’emploi ont été plus marquées au Royaume-Uni.

Changement d’attitude des établissements prêteurs

Face à cette situation, les établissements financiers comme le gouvernement, soucieux de limiter l’impact de la crise, cherchent les moyens de permettre aux emprunteurs de traverser cette période difficile avec le moins de dégâts possible. C’est ce que montre une récente étude publiée par Shelter, une organisation caritative oeuvrant dans le champ du logement (Unchartered territory : managing mortgage arrears and possessions - Janet Ford et Alison Wallace, Center for Housing policy, University of York, juillet 2009). Les établissements prêteurs, du moins certains d’entre eux, semblent avoir pris conscience que la saisie n’était pas forcément le moyen le plus efficace de limiter les pertes en période de crise. Ils ont donc tendance à abandonner leur politique traditionnelle de «pay or possess» (payez ou on vous saisit) pour une approche personnalisée du traitement des difficultés. Ils s’efforcent pour cela d’établir avec l’emprunteur un contact le plus précoce possible et tentent de trouver une solution financière permettant d’éviter l’interruption du contrat. Différents moyens peuvent être envisagés : le refinancement du crédit à l’aide d’un prêt moins cher et/ou d’une durée plus longue, l’abandon des pénalités sur les arriérés, et surtout le report partiel ou total d’échéances (payment holidays). De telles mesures ne sont évidemment pas sans risque, car elles reposent sur l’hypothèse que les difficultés du ménage sont passagères et que sa situation (et son revenu) pourra s’améliorer dans un délai raisonnable. Si tel n’est pas le cas, la dette du ménage va s’alourdir et la perte du prêteur sera accrue. Les établissements qui adoptent cette ligne de conduite parient donc sur une reprise économique prochaine et sur l’arrêt rapide de la baisse des prix immobiliers. Ce mode de traitement des difficultés des emprunteurs exige que les prêteurs soient en mesure de réagir dès l’apparition d’un retard de paiement, voire de l’anticiper, et de proposer des solutions adaptées aux situations particulières, ce qui implique une gestion plus rigoureuse, un renforcement des services concernés, la mise en place de formations spécifiques, voire une modification des critères de rémunération pour encourager une approche centrée sur le client. Cela suppose aussi une organisation laissant aux équipes de négociateurs une certaine autonomie de décision. Pour faciliter le contact avec les emprunteurs en situation précaire, certains établissements ont mis en place des centres d’appels et élargi leurs horaires de réception aux soirs et aux week-ends. C’est une petite révolution culturelle qui, on le conçoit, ne se fait pas partout à la même vitesse. L’étude indique d’ailleurs que ces innovations ne concernent encore qu’une partie des prêteurs.

L’efficacité du conseil

Elle souligne également le rôle positif des conseillers indépendants. Considérés auparavant avec méfiance par les prêteurs, ils sont aujourd’hui vus comme des «facilitateurs» dont l’intervention augmente les chances de trouver une solution viable. La collaboration nouée entre certains établissements et le service national de conseil témoigne de ce changement d’attitude : le prêteur propose à l’emprunteur de consulter un conseiller qui étudie sa situation et évalue sa capacité de remboursement, son évaluation étant automatiquement acceptée par l’établissement.

Les mesures gouvernementales

Les pouvoirs publics ont également pris des initiatives pour réduire le nombre de saisies, en mettant en place en 2009 un dispositif à trois volets : le support for mortgage interest (SMI), qui s’adresse aux emprunteurs ayant perdu leur emploi depuis plus de trois mois, prend en charge le paiement des intérêts dans certaines limites ; le homeowners mortgage support (HMS), une aide au report d’intérêts pour les accédants (les investisseurs n’y sont pas éligibles) ayant souscrit un prêt in fine ; le mortgage rescue scheme (MRS), dont le but est de permettre aux accédants, lorsque la vente est inévitable, de rester locataires de leur logement. Selon les estimations gouvernementales, 10 000 ménages pourraient bénéficier du SMI, 42 000 du HMS et 6 000 du MRS.

Quoique bienvenues, ces mesures font l’objet de critiques de la part des prêteurs qui regrettent notamment l’absence de concertation préalable et la complexité qui en résulte. De la part des prêteurs comme des pouvoirs publics, la crise actuelle marque une prise de conscience et un changement d’attitude par rapport aux pratiques antérieures. La saisie immobilière semble ne plus être vue comme la sanction qui s’impose normalement aux emprunteurs incapables de faire face à leurs échéances, ces derniers n’étant plus considérés comme seuls responsables de leurs difficultés financières. S’agit-il d’une évolution durable ou du traitement ponctuel des conséquences de la crise ? Cette question, soulevée par les auteurs de l’étude, ne trouvera sa réponse qu’une fois la reprise venue. Rien ne permet pour l’heure d’exclure un retour aux pratiques antérieures dès que le marché du crédit aura retrouvé une situation plus stable.


ID: 44795
Date de parution: 23/11/09
   
URL(s):

Managing arrears at http://www.york.ac.uk
 

Created: 23/11/09. Last Changes: 23/11/09.
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