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JURISPRUDENCE UE - Vers la non-application de l'article 81 CE aux systèmes d'échange d'informations entre banques sur la solvabilité des emprunteurs..., la Cour de justice venant préciser ce qu'il faut entendre par « utilisateurs » pour la mise en oeuvre de la deuxième condition de l'article 81, § 3, CE impliquant qu'une partie équitable du profit qui en résulte soit réservée aux utilisateurs [2 arrêts]
Suivant pour l'essentiel les conclusions présentées le 29 juin 2006 par l'avocat général Geelhoed dans l'affaire C-238/05 (ASNEF-EQUIFAX, Servicios de Información sobre Solvencia y Crédito, SL et Administración del Estado contre Asociación de Usuarios de Servicios Bancarios (AUSBANC)) relative à une demande de décision préjudicielle déposée par le Tribunal Supremo (Espagne), la Cour de justice des Communautés européennes est venue, au terme d'un arrêt remarquable- ment motivé, conforter la validité des systèmes d'échange d'informations entre banques sur la solvabilité de leurs emprunteurs au regard du droit des ententes.

Ce type de fichier, qui vise, en mettant à la disposition des fournisseurs de crédit des informations pertinentes sur les emprunteurs existants ou potentiels, notamment en ce qui concerne la manière dont ces derniers ont précédemment honoré leurs dettes, à réduire l'asymétrie d'information et, partant, à réduire le taux de défaillance des emprunteurs et, ce faisant, à améliorer le fonctionnement de l'offre de crédit, est présent à travers toute l'Europe, d'où l'importance pratique du présent arrêt.

Mais, de tels échanges d'informations entre banques sur la solvabilité des emprunteurs ne risquent-ils pas d'atténuer, voire de supprimer le degré d'incertitude sur le fonctionnement du marché en cause avec comme conséquence une restriction de la concurrence entre entreprises au sens de l'arrêt de la Cour du 28 mai 1998, Deere/Commission (C-7/95 P, Rec. p. I-3111), jurisprudence dite des « tracteurs anglais » mise en oeuvre par le Conseil de la concurrence sur les marchés oligopolistiques dans les affaires des palaces parisiens et de la téléphonie mobile ?

En l'espèce, la Cour de cassation espagnole posait deux questions sur l'interprétation de l'article 81 CE et concernant plus spécifiquement le point de savoir si un fichier d'informations sur la solvabilité des emprunteurs (identité et activité économique et situations particulières telles que la faillite ou l'insolvabilité), accessible contre paiement d'une redevance à tous les établissements financiers et de crédit en Espagne, tombait sous le coup de l'article 81, § 1, CE et, le cas échéant, s'il était susceptible d'être autorisé par les ANC des États membres en vertu de l'article 81, § 3, CE.

S'agissant tout d'abord de la recevabilité de la demande préjudicielle, la Cour, rappelant que la procédure prévue à l'article 234 CE a pour but de contribuer à l'administration de la justice dans les États membres et non de formuler des opinions consultatives sur des questions générales ou hypothétiques, retient que, dans la présente affaire, il n'apparaît pas de manière manifeste que l'interprétation de l'article 81 CE n'a aucun rapport avec la réalité ou l'objet du litige dont est saisie la juridiction de renvoi, lequel n'est à l'évidence pas de nature hypothétique.

Sur le fond de l'affaire, la Cour commence par s'interroger sur l'application du droit communautaire en l'espèce, bref sur l'incidence de la pratique sur le commerce entre États membres. Sur ce point, après avoir passé en revue plusieurs facteurs dont la réunion est susceptible de démontrer l'incidence de la pratique sur les échanges intracommunautaires, la Cour relève qu'il appartient à la juridiction nationale de vérifier si, eu égard aux caractéristiques du marché en cause, il existe un degré suffisant de probabilité que la mise en oeuvre du fichier exerce une influence directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur l'offre de crédit en Espagne par des opérateurs d'autres États membres et que cette influence ne soit pas insignifiante, et donc de dire en dernier lieu si le fichier est susceptible d'affecter le commerce entre États membres.

À partir de là, la Cour examine l'existence d'une restriction de concurrence au regard de l'article 81 CE. D'emblée, elle affirme que les fichiers tels que celui en cause au principal n'ont pas pour objet, par leur nature même, d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun au sens de l'article 81, paragraphe 1, CE, et se met donc en quête, à dessei d'assister la juridiction de renvoi, de vérifier si les échanges d'informations entre banques sur la solvabilité des emprunteurs n'ont pas pour effet d'entraver la concurrence.

Estimant, à la suite de l'avocat général Geelhoed, qu'un tel système, qui implique inévitablement une certaine coopération entre concurrents sous la forme d'un échange indirect d'informations concernant le crédit, ne consiste cependant pas à fixer un taux d'intérêt commun ou à exclure collectivement certaines catégories de clients, la Cour entend écarter en l'espèce l'application de la jurisprudence John Deere, estimant que l'exigence d'autonomie impliquant que tout opérateur économique doit déterminer de manière autonome la politique qu'il entend suivre sur le marché commun n'exclut pas le droit des opérateurs économiques de s'adapter intelligemment au comportement constaté ou escompté de leurs concurrents. Si de tels systèmes sont de nature à réduire l'incertitude quant au risque de défaillance des demandeurs de crédit, ils ne sont toutefois pas susceptibles de diminuer l'incertitude quant aux risques de la concurrence. Pour autant que l'on serait bien en présence d'un marché atomisé, ce qu'il revient à la juridiction de renvoi de vérifier, la Cour rappelle qu'en pareil cas, la diffusion et l'échange d'informations entre concurrents peuvent être neutres, voire positifs, pour la nature compétitive du marché : en réduisant le taux de défaillance des emprunteurs, les fichiers sont en principe de nature à améliorer le fonctionnement de l'offre de crédit. Et Cour de conclure que, pour autant que le ou les marchés concernés ne soient pas fortement concentrés, que le système ne permette pas d'identifier les créanciers et que les conditions d'accès et d'utilisation pour les établissements financiers ne soient pas discriminatoires, un système d'échange d'informations tel que le fichier n'est pas susceptible, en principe, d'avoir pour effet une restriction de la concurrence au sens de l'article 81, § 1, CE.

Quant à savoir si l'accord est susceptible d'être autorisé par les autorités d'un État membre en vertu du § 3 de l'article 81, et spécialement si une partie équitable du profit sera réservée aux consommateurs, la Cour vient préciser la deuxième des conditions posées par le texte et singulièrement ce qu'il faut entendre par « utilisateurs ». Faut-il donc pour bénéficier de l'exemption prévue au § 3, que tous les utilisateurs tirent profit du fichier. Il était en effet allégué que certains demandeurs de crédit pourraient, en raison de l'existence de tels fichiers, être confrontés à des majorations de taux d'intérêt, voire à des refus de crédit, et partant ne tirer aucun profit de la pratique. En réponse à cette objection, la Cour pose le principe aux termes duquel, « au regard de l'article 81, § 3, CE, c'est le caractère favorable de l'incidence sur l'ensemble des consommateurs dans les marchés pertinents qui doit être pris en considération et non pas l'incidence sur chaque membre de cette catégorie de consommateurs ». En d'autres termes, peu importe que la pratique ne bénéficie pas à certains utilisateurs, du moment que, dans leur ensemble, ils en tirent un profit équitable. or, en l'espèce, il apparaît qu'une estimation plus exacte des risques peut se traduire par une diminution générale du coût des opérations de crédit ce qui est, en général, en faveur des consommateurs, même si une meilleure connaissance du risque doit se traduire par une distinction entre les bons débiteurs (moins de risque, donc moins d'intérêt) et les mauvais débiteurs (confrontés à des majorations de taux, voire à des refus de crédit). Du reste, à propos de ces derniers utilisateurs, la Cour suggère que ces demandeurs pourraient néanmoins bénéficier d'un éventuel effet de discipline en matière de crédit ou d'une protection contre le surendettement, de sorte que la condition selon laquelle une partie équitable du profit doit être réservée aux utilisateurs pourrait aussi être remplie à leur égard

ID: 39193
Auteur(s): iff
Date de parution: 23/11/06
   
URL(s):

La Cour de justice des Communautés européennes
 

Created: 07/12/06. Last Changes: 07/12/06.
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