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"La Richesse des Nations" Session A1 Rapport pays: La France
POUR UN CREDIT RESPONSABLE (par Nicole Perez, UFC-Que Choisir)

Il existe ces dernières années, en France, une volonté politique forte de développer le crédit dans un souci de relance de la consommation. Conséquence ou non de cette volonté, L’ANNEE 2005 MARQUE UNE DES PROGRESSIONS LES PLUS ELEVEES JAMAIS OBSERVEES EN FRANCE. Cette détermination à promouvoir la consommation de crédits s’appuie sur le fait que les français sont soit-disant sous-endettés par rapport à leurs voisins européens. La comparaison est généralement faite avec le Royaume-Uni où 49,3 % des ménages possèdent un crédit à la consommation et 41,9 % un crédit immobilier. En France, il s’agit de 34,5 % des ménages qui détiennent des crédits à la consommation (33 % en 2004) et 30,5 % des crédits immobiliers (29,1 % en 2004).

Mais parallèlement à ces chiffres, LE NOMBRE DE DOSSIERS DE SURENDETTEMENT AUGMENTENT LUI AUSSI ET CE REGULIEREMENT. Les derniers chiffres disponibles pour le mois de mars 2006 montrent une progression de 11,7% des dossiers déposés par rapport au mois précédent, et une augmentation de 10,6% par rapport à mars 2005. Depuis 2003, il s’agit de 587 000 dossiers déposés.
Ainsi, depuis leur création en 1989, les commissions de surendettement doivent traiter de plus en plus de dossiers de surendettement. Le phénomène du surendettement ayant pris une telle ampleur et sa nature ayant évolué (passage du surendettement dit actif au surendettement dit passif), le législateur a mis en place depuis le 1er août 2003, une nouvelle procédure de traitement, la Procédure de Rétablissement Personnel (PRP). Assimilée à la faillite civile cette procédure permet d’effacer totalement le passif de la personne surendettée lui offrant ainsi une seconde chance. Depuis 2004, 22 000 dossiers par an sont orientés vers la PRP.

Face à ces deux phénomènes contradictoires, sous endettement et sur endettement, une réflexion sur le marché du crédit s’impose. Il apparaît nécessaire de détailler l’endettement des ménages en fonction des différentes formes de crédit ainsi que leur évolution pour évaluer s’il n’y a pas un risque de « mauvais crédit », (c’est-à-dire un crédit inadapté au besoin du consommateur), qui chasserait le bon crédit et expliquerait cette contradiction. La question principale est en effet de savoir si les français sont bien endettés et si les pratiques des établissements de crédits assurent un endettement sain, et une utilisation rationnelle du crédit. Il faut donc cerner les besoins et contraintes de chaque acteur pour ainsi définir des pratiques justes et un cadre légal adapté.

Le marché du crédit à la consommation s’organise autour de différents établissements de crédit, qui ont en France, au contraire de nombreux Etats membres, le monopole de la distribution de crédit. Il s’agit des établissements à vocation générale (les banques) et les établissements spécialisés qui sont en général des filiales soit de grands groupes bancaires, soit de groupes de la distribution.

Ces établissements proposent différents types de crédit à la consommation, affectés ou non à l’acquisition de biens ou de services. Les plus répandus sont les prêts personnels (48%), les prêts renouvelables, pourtant la forme la plus dangereuse pour les consommateurs, représentent 24% alors que les prêts affectés, plus sécurisés, ne constituent que 18% du passif de crédit à la consommation.

Ces crédits à la consommation financent des projets de consommation (automobiles, équipement de la maison…), mais ils servent aussi de plus en plus à faire face aux dépenses de la vie courante. Il est donc très important que le crédit, pour qu’il ne soit pas un facteur aggravant des difficultés financières de l’emprunteur, soit en complète adéquation avec les besoins et les capacités du consommateur.

L’action de l’UFC n’est donc pas de dénoncer et de restreindre le crédit à la consommation mais de trouver les moyens de le réguler afin que CHAQUE CONSOMMATEUR AIT ACCES AU CREDIT LE PLUS ADAPTE A SA SITUATION.

La problématique est double : il faut en premier lieu que l’octroi du crédit soit conditionnée à un réel examen de la capacité financière du client et en second lieu, que le crédit proposé par le vendeur corresponde à la demande exprimée par le client ; en fait que le vendeur fournisse un véritable conseil. Cet aspect est primordial dans la mesure où une mauvaise forme de crédit peut avoir des conséquences financières importantes pour le consommateur.

Le moment de l’acceptation du crédit est certes le moment clef puisqu’il lie les deux contractants, il est toutefois intéressant de voir en amont comment le produit est vanté pour stimuler la demande du consommateur, quelles sont les informations mises en avant dans le message publicitaire, comment s’équilibre l’offre commerciale et l’information du consommateur ?

Il ne s’agit pas de diaboliser le crédit mais d’éviter certaines dérives en développant un crédit responsable. Cette notion de prêt responsable implique une publicité loyale et informative, un devoir de conseil renforcé, pour un crédit adapté aux besoins de l’emprunteur et un recouvrement respectueux des droits de la personne. La législation française dans le domaine du crédit à la consommation s’est étoffée ces dernières années mais des améliorations demeurent. Nous allons présenter les vides qui restent à combler.

Le premier contact du consommateur avec le crédit passe par la publicité. Le message qu’elle véhicule est donc primordial car il peut être déclencheur de l’acte d’endettement.


LA PUBLICITE

La publicité peut être définie largement comme « toute information vantant un produit ou un service dans le but de stimuler la demande du consommateur ». Compte tenu de la spécificité du produit-service crédit, de ses implications économiques pour le consommateur, la publicité doit être absolument « loyale et informative ». Elle doit être claire pour que le consommateur ait conscience qu’il s’agit d’un acte d’endettement. Le contenu et la forme des publicités diffusées par les établissements de crédit constituent à l'évidence une des causes d'un endettement non maîtrisé. Il est donc nécessaire d’établir en matière de publicité sur le crédit à la consommation un juste équilibre entre l’offre commerciale et l’information nécessaire du consommateur. La réglementation sur la publicité du crédit à la consommation (articles L 311.4 et suivants du Code de la consommation) qui est l’une des plus anciennes parmi les réglementations instituant des régimes spéciaux de publicité, a été complétée dernièrement en 2003 par la loi de sécurité financière (exemple).

Pourtant, l'adoption de cette loi récente en la matière n'a pas réglé le problème puisque deux ans après son entrée en vigueur, la DGCCRF a réalisé une enquête dans ce domaine qui constatait que 20 % des publicités vérifiées comportaient au moins une non-conformité.

Mais même dans l’hypothèse où les publicités comportent toutes les mentions légales, elles ne sont en aucun cas " loyales et informatives ".
L’UFC Que Choisir a en effet étudié, comme chaque année, les publicités et n’a pu que constater que les pratiques des professionnels n'avaient pas évoluées.

Le principal point commun des documents publicitaires étudiés est la banalisation de l’acte de crédit. Le caractère risqué et non anodin de cet acte n’est jamais mis en avant.
Malgré l’effort des établissements financiers pour banaliser la souscription de crédits à la consommation, celui-ci demeure un acte risqué.

Aussi, est-il impératif que les conditions de diffusion des offres de crédit n’altèrent en rien les facultés de discernement des destinataires sur le risque de l’opération proposée.

Ces offres nous paraissent dangereuses et critiquables pour les raisons suivantes :

*ELLES RENVERSENT LE PROCESSUS DE SOUSCRIPTION D’UN CREDIT : le consommateur n’a pas besoin d’exprimer une demande, l’établissement prêteur devient demandeur,
*ELLES CREENT UN BESOIN OU UNE ENVIE CHEZ LE CONSOMMATEUR, QUI PEUT ETRE AU-DESSUS DE SES POSSIBILITES DE REMBOURSEMENT : « demandez jusqu'à 3000€ pour les soldes » Finaref Compte Mistral (période des soldes d’hiver de janvier 2005), « A nouvelle année, nouveaux projets ! un voyage, un home-cinéma, la déco du salon ?… »Sofinco
*ELLES CHERCHENT A DECULPABILISER LE CONSOMMATEUR : « Soyons clairs : un problème d’argent ça peut arriver à tout le monde » Mediatis
*ELLES BANALISENT L’ACTE D’ENDETTEMENT, et privent volontairement l’emprunteur de la conscience de la portée de ses engagements : « Empruntez comme vous vivez », « Et vous combien voulez-vous ? » Créatis
*ELLES SONT SOUVENT PRESENTEES DE FAÇON A POSITIVER L’ACTE D’ENDETTEMENT (montrer sous l’angle du « bénéfice - consommation » ou de l’acquisition, plutôt que sur celui de l’endettement et de son coût); et amorcent ainsi des modifications culturelles et sociologiques majeures,
*LA TERMINOLOGIE EMPLOYEE CREE VOLONTAIREMENT UNE CONFUSION ENTRE LES NOTIONS DE CREDIT ET D’EPARGNE : « réserve disponible », pour désigner en réalité un montant de crédit autorisé,
*ELLES CREENT L’ILLUSION DE LA FACILITE, ET DE LA GRATUITE (on croit qu’il est facile d’avoir ce qu’on veut aujourd’hui), on oublie que cette apparente facilitée comporte un coût, qui peut d’ailleurs tourner au cauchemar pour certaines familles.
*ces mailings s’apparentent quelquefois, quant à leur forme, aux mailings des sociétés de VPC qui annoncent à leurs destinataires avoir gagné le « gros lot » (exemple : envoi par la Banque populaire d’un fac-similé du relevé de compte du destinataire de l’offre, crédité artificiellement du montant du crédit proposé !).
*CES METHODES SEMBLENT PLUS PROCHES DU DEMARCHAGE QUE DE LA PUBLICITE, COMPTE TENU DU CARACTERE PRECIS, CHIFFRE ET PERSONNALISE DES MESSAGES,
*LES ETABLISSEMENTS DE CREDIT N’HESITENT PAS A RELANCER LE CLIENT QUI AURAIT OUBLIE DE REPONDRE : « Or à ce jour, je n’ai toujours pas reçu de vos nouvelles. Peut-être s’agit-il d’un oubli ou peut être nos courriers se sont-ils croisés ? Quelle qu’en soit la raison, j’ai décidé exceptionnellement de prolonger cette offre jusqu’au… » Finaref Compte Challenger.

L’UFC souhaite que la publicité reflète un message sans ambiguïté c’est-à-dire clair, et non trompeur. Cela passe par :
- un vocabulaire adapté c’est-à-dire que le crédit soit appelé crédit : tout autre mot ou expression qui nourrit la confusion entre épargne et crédit (comme demande de virement) doit être banni
- arrêter les ambiguïtés, c’est-à-dire que le discours crée l’illusion de la gratuité et de la facilité, dissimulant sciemment à l’emprunteur potentiel le coût de l’opération
- arrêter la prime au crédit c’est-à-dire la décision de souscrire un crédit ne doit pas influencée par l’obtention d’un cadeau : l’offre de cadeau qui accompagne l’offre de crédit doit être interdite.

Il s’agit là des conditions minimales pour une publicité responsable.

POUR UN OCTROI DE CREDIT RESPONSABLE : améliorer l’information des parties et le conseil pour un crédit adapté au besoin et à la situation de l’emprunteur


1. L’INFORMATION:

La bonne connaissance de la situation financière du demandeur de crédit permet au prêteur d’apprécier la solvabilité de l’emprunteur et d’éviter d’octroyer un crédit lorsque l’endettement est trop élevé. Trop de prêts sont encore accordés sans aucune préoccupation quant aux capacités réelles de remboursement. En effet, certains prêts, en particulier les crédits revolving adossés aux cartes privatives sont consentis sur la seule présentation d’une carte bancaire ou d’un chèque barré, et d’un RIB. Aucune pièce justificative de la situation financière de l’emprunteur n’est réclamée. D’autres sont consentis alors même que l’emprunteur est inscrit au FICP et connaît déjà des difficultés qui risquent d’être aggravées par un crédit trop facilement octroyé et peut-être mal adapté. En outre, cette situation qui prévaut aujourd’hui, basée sur un déclaratif de l’emprunteur est défavorable au consommateur puisque c’est sur lui que repose la responsabilité. Il est donc nécessaire que l’implication du professionnel, et donc de sa responsabilité soit plus importante et par la même que l’information soit accrue.

• UNE OBLIGATION DE PIECES JUSTIFICATIVES POUR UNE RESPONSABILITE PARTAGEE ENTRE PRETEUR ET EMPRUNTEUR

A la signature du contrat, certains établissements prêteurs ne demandent aucunes pièces justificatives de la situation financière de l’emprunteur.
Le consommateur doit uniquement remplir le cadre relatif « aux informations indispensables au traitement rapide » du dossier et certifier sur l’honneur que les renseignements sont exacts. Il s’agit pour le client d’évaluer son budget mensuel : total des revenus nets, loyer ou remboursement du prêt de l’habitation, et autres charges mensuelles ou total des remboursements de crédit. Une fausse déclaration engageant la responsabilité de l’emprunteur. La responsabilité ne repose donc que sur le consommateur, l’organisme de crédit qui apparemment ne souhaite pas s’embarrasser de « paperasse inutile » permettant pourtant de former et de compléter le dossier de son client, se dégage finalement de toute responsabilité.
Or les personnes qui seraient tenter de gonfler leurs revenus ou de sous estimer leurs charges sont certainement celles qui sont déjà en difficulté et qui sont tenté de souscrire à ce crédit, facile d’accès, pour soulager leur fin de mois. Ce nouveau crédit, contracté sans problème puisque aucune vérification n’est faite, pourra précipiter l’emprunteur dans une situation de surendettement. Et l’organisme prêteur ne ratera pas l’occasion de mettre en doute la bonne foi de l’emprunteur.
Si l’obtention du nouveau crédit avait été conditionnée à l’examen des justificatifs de la situation financière de l’emprunteur, le crédit aurait pu être refusé (le consommateur en difficultés et dans l’impossibilité d’obtenir un nouveau crédit, devra chercher d’autres moyens plus appropriés pour faire face à sa situation, comme déposer un dossier de surendettement). Si le crédit est accepté par le prêteur, les responsabilités sont partagées.
Il est donc nécessaire de rééquilibrer les responsabilités par exemple en obligeant l’établissement prêteur à demander un certain nombre de pièces justificatives pour constituer le dossier de son client et évaluer la capacité d’emprunt.
Le consommateur doit fournir ces pièces afin que le contrat puisse se former.
Les pièces demandées par le prêteur au consommateur doivent au moins comporter les feuilles de salaires, l’avis d’imposition et les derniers relevés de compte.

• LA CONSULTATION DU FICP EST UNE AUTRE SOURCE D’INFORMATION POUR LE PRETEUR QUI DOIT ETRE MISE EN AVANT ET SURTOUT ETRE OBLIGATOIRE

L’UFC-Que Choisir réclame aussi, afin de connaître parfaitement l’état d’endettement du demandeur de crédit que le prêteur ait l’obligation de consulter le FICP, et que cette consultation soit mentionnée dans l’offre préalable de crédit consenti.
Car il apparaît dans les dossiers de surendettement que certains crédits sont accordés alors que la situation du consommateur est particulièrement obérée. Il est nécessaire que ce type de pratiques déloyales soit puni et que l’emprunteur n’en supporte plus seul les conséquences désastreuses.

Cette disposition formalise l’obligation du prêteur de prendre toute garantie quant à la solvabilité de l’emprunteur, et règle également la difficulté de preuve à laquelle nous sommes confrontés aujourd’hui. En effet, lorsqu’un établissement de crédit consulte le FICP, il n’en reste aucune trace. En conséquence, il est impossible de mettre en oeuvre la responsabilité du prêteur qui aurait consenti un crédit sans consultation du FICP.

Le non-respect de cette obligation rendrait l’offre préalable irrégulière du fait de l’absence d’une de ses mentions obligatoires, la sanction prévue à cet effet étant la déchéance du droit aux intérêts, conformément aux dispositions de l’article L-311-33 du code de la consommation (pour le crédit à la consommation). Dans le cas d’un crédit immobilier, et selon l’article L-312-33, la sanction principale consiste en une amende de 3 750 euros, la déchéance des intérêts étant une peine accessoire. Autre conséquence logique, la créance devient irrecevable lors d’une procédure de surendettement.

Ces propositions peuvent facilement et rapidement être mises en œuvre et c’est seulement s’il s’avère qu’elles sont insuffisantes pour augmenter le niveau d’information, que l’établissement d’un fichier positif pourra être envisagé.
L’UFC-Que Choisir s’oppose, pour l’instant, à la constitution de ce fichier. La plupart des fichiers positifs existants ne sont pas exempts de failles : deux ménages présentant le même taux d’endettement ne gèrent pas leur budget de la même façon selon le nombre de leurs enfants, le prix de leur loyer… Comment alors utiliser ce type d’outil à bon escient ? En outre, il risque d’entraîner une standardisation excessive du mode de traitement des dossiers de crédit. La fréquence d’actualisation de ce fichier est aussi une question essentielle.

La prévention du surendettement passe par une meilleure information du prêteur à la souscription du crédit car il faut pouvoir éviter qu’un consommateur lourdement endetté puisse accumuler les crédits. Mais elle passe aussi par une information approprié de l’emprunteur. Le deuxième rempart à un mauvais endettement est donc un conseil efficace du prêteur qui doit permettre une adéquation parfaite entre le besoin exprimé du consommateur et le crédit proposé.



2. LE DEVOIR DE CONSEIL : POUR UN CREDIT ADAPTE AU BESOIN ET A LA SITUATION DE L’EMPRUNTEUR

Le devoir de conseil est un élément essentiel au crédit responsable puisqu’il doit permettre d’ éviter un « mauvais endettement », source de difficultés à moyen terme pour le consommateur. Par exemple, qu’un investissement précis (un bien ou un service) soit financé par un crédit revolving ou encore que des difficultés bancaires passagères soit comblée par ce type de crédit alors qu’il existe des formes de crédit moins chères et surtout plus protectrices pour le consommateur (crédit personnel, crédit affecté) ne devrait plus être possible.

La pratique qui se développe fortement, et qui est loin d’être responsable de la part des établissements de crédit, est en effet celle de proposer au client un crédit renouvelable pour financer le service que celui-ci vient d’acheter. Le type de crédit le plus approprié n’est pourtant pas ce dernier, il s’agirait plutôt d’un crédit affecté. La différence est importante quant aux régimes juridiques. Elle l’est aussi dans le fonctionnement, puisque le crédit affecté est toujours limité dans son montant et sa durée, tandis que le crédit renouvelable ne connaît ni l’une, ni l’autre de ces bornes raisonnables.

Nous voyons bien pourquoi cette pratique a de plus en plus tendance à se développer, les établissements de crédit étant doublement gagnants. D’une part, l’utilisation d’un crédit revolving au lieu d’un crédit affecté évite l’interdépendance (c’est-à-dire que si la vente est annulée, le remboursement du crédit est maintenu). D’autre part, cela permet à l’établissement de crédit de se rémunérer d’avantage puisque s’il s’agissait d’un crédit affecté ou personnel, le taux pratiqué aurait été moins élevé pour ne pas être considéré comme usuraire.
Cette pratique a été illustrée en France dernièrement dans le cas des abonnements aux clubs de sport. Les clients qui ont souscrit un crédit dans le seul but de financer leur abonnement au club de sport se sont retrouvés, après que le club ait fermé ses portes, à devoir continuer de payer leur crédit alors même que la prestation pour laquelle ils l’ont souscrit n’existe plus.

Heureusement, la jurisprudence intervient de temps en temps pour rééquilibrer la situation et mettre fin aux excès. la Cour de Cassation est revenue dans un arrêt du 7 février 2006 sur sa jurisprudence très formaliste sur le crédit affecté qui était très défavorable aux consommateurs (c’est-à-dire que si l’offre de crédit ne spécifie pas l’objet financé, il ne s’agit pas de crédit affecté avait-elle d’abord affirmé), et a estimé que la scission apparente entre le contrat de crédit et le contrat d'abonnement au club de sport avait eu pour but de tourner les dispositions d'ordre public du code de la consommation posant le principe de l'interdépendance. Elle a donc jugé que les contrats conclus pour la souscription d'un abonnement à un club de gym était bien un crédit affecté et qu'il y avait une collusion entre la société gérante du club de sport et l’établissement de crédit Franfinance destiné à tromper le consommateur.

En outre, la responsabilité des prêteurs est en pratique peu recherchée et rarement engagée et les emprunteurs mal conseillés assument seuls les conséquences d’un endettement qui aurait pu leur être évité par le refus d’accorder le crédit. Toutefois, dans un arrêt du 8 juin 2004, la Cour de cassation condamne une banque pour avoir octroyé un crédit sans avoir mis en garde l’emprunteur d’un endettement excessif, et alors même qu’il existait une prévisibilité d’un endettement excessif.

Ainsi, en France, le devoir de conseil, comme le devoir d’information, et de mise en garde est essentiellement une notion doctrinale tirée de la jurisprudence.
Il serait souhaitable que la loi spécifie clairement le devoir de conseil ou que certaines dispositions législatives assurent que le consommateur ait accès au bon crédit. Une des solutions pour éviter un « mauvais endettement » serait par exemple de qualifier d’office le crédit de crédit affecté dans le cas de l’achat d’un bien ou service simultanément à l’ouverture d’un crédit. En outre le non-respect d’un véritable devoir de conseil à la charge du prêteur professionnel doit être sanctionné efficacement.


CONCLUSION :
La notion de prêt responsable, à travers l’obligation de conseil, est donc essentielle et devrait être inhérente au métier de prêteur. Un établissement qui ne dispose pas d'informations suffisantes sur le client ne devrait pas accorder de crédits. Nous souhaiterions pour cela l'instauration d'une liste obligatoire de justificatifs ainsi que la consultation obligatoire du FICP, assortie de sanctions efficaces. En outre, à partir des informations qu’il a récolté, le prêteur doit avoir le devoir de proposer le produit le mieux adapté aux besoins exprimés par le consommateur et à ses possibilités.


Un crédit responsable s’entend aussi lors de la défaillance de l’emprunteur. Les pratiques des établissements de crédit lorsque l’emprunteur connaît des difficultés ne doivent pas les accentuer et les aggraver.

LA DEFAILLANCE DE L’EMPRUNTEUR

A l’heure actuelle, aucune obligation n’est faite aux prêteurs d’informer l’emprunteur de façon précise sur sa défaillance et sur les moyens mis à sa disposition pour éviter de plonger dans une situation plus grave. Un accompagnement des établissements de crédit doit être mis en place et systématisé. L’UFC-Que Choisir propose qu’obligation soit faite à l’établissement de crédit d’informer l’emprunteur défaillant des différentes possibilités en cas d’endettement, notamment de l’existence de la commission de surendettement, de la possibilité de saisir le juge pour demander des délais de paiement pouvant aller jusqu’à deux ans (article 1244-1 du code civil), de l’existence d’un numéro vert grâce auquel il obtiendra les coordonnées d’un interlocuteur unique qui le restera jusqu’à régularisation de sa situation.

- LES PRATIQUES DES SOCIETES DE RECOUVREMENT doivent respecter les droits de la personne. Certaines méthodes de recouvrement des créances sont particulièrement condamnables : harcèlement téléphonique, appels téléphoniques à des tiers (employeurs, membres de la famille, voisins…), courriers de relance incessants…Cette intimidation a pour conséquence, en déstabilisant l’emprunteur, d’inverser l’ordre de priorité dans le remboursement des dettes. C’est ainsi que de plus en plus d’emprunteurs qui connaissent de graves difficultés financières préfèrent régler leurs crédits à la consommation plutôt que leurs dettes plus « vitales », le loyer, l’électricité…en courant le risque de perdre leur logement et de basculer dans l’exclusion sociale.
Le harcèlement moral et d’atteinte à la dignité en matière de recouvrement de créances doit donc être interdit pour éviter des situations plus graves, notamment lorsqu’un consommateur est en procédure de rétablissement personnel, il ne devrait pas être possible que les sociétés de recouvrement continuent à réclamer les créances..
En outre, la phase de recouvrement des créances nécessite de voir sa durée restreinte, car le montant des frais de recouvrement et des pénalités de retard s’accumulant, et le débiteur est encore plus profondément plongé dans une situation de surendettement.


CONCLUSION : OUVERTURE SUR LA DIRECTIVE

Ces demandes et propositions que l’UFC Que Choisir portées depuis des années auprès du législateur national, qui en a quand même intégrées quelques-unes à travers différentes lois, doivent aujourd’hui être défendues, et portées au niveau de l’Europe.
L’enjeu que représente l’adoption de la directive crédit à la consommation pour les consommateurs doit mobiliser l’ensemble des forces car si les associations de consommateurs s’étaient tout d’abord réjouies de la première version de directive proposée par la commission, les derniers développements font naître des craintes sur le niveau de protection des consommateurs européens et français en particulier.
Le premier point problématique est la méthode d’harmonisation retenue dans la proposition modifiée de la directive. S’il est encore difficile d’appréhender exactement les conséquences de cette méthode de par la combinaison de plusieurs principes (harmonisation maximale, reconnaissance mutuelle et liberté des Etats), le principe de reconnaissance mutuelle implique que la connaissance des différentes législations européennes incombe aux consommateurs et non aux professionnels.

Pour les consommateurs français, la directive comporte peu d’avancées et beaucoup de recul.
En effet, l’adoption de la directive dans son état actuel entraînerait une baisse sensible de la protection des consommateurs français pour ce qui concerne :
- le remboursement anticipé,
- la mise à disposition du crédit pendant le délai de rétractation
- les crédits renouvelables ne sont plus limités à un an renouvelable comme c’est le cas en droit français. De plus la règle qui impose de recueillir l’accord préalable du consommateur à une modification des conditions initiales n’est pas inscrites dans la directive.
- Le crédit « gratuit » ne fait pas l’objet de règles protectrices garantissant la réalité de cette gratuité.
- Régime de protection allégé pour les crédits d’un montant inférieur à 300 €.


L’UFC Que Choisir souhaite donc:
- L’élargissement du champ d’application pour les crédits de 0 € à 50 000€.
- que les fournisseurs de biens et services soient bien soumis aux obligations d’information (suppression de l’article 7 et du considérant 18)
- La non mise à disposition des fonds pendant le délai de réflexion.
- Pour les transactions liées, que le projet de directive prévoit clairement le cas où le droit de rétractation est exercé pour le contrat de crédit.

Mais surtout, il existe une opportunité intéressante qui est celle de l’introduction du principe de « prêt responsable » dans la directive. Cette notion qui consiste pour le prêteur à mettre à la disposition les informations précontractuelles ainsi que « d’évaluer la solvabilité du consommateur à partir des informations précises fournies par ce dernier et au besoin de consulter la base de données appropriée » doit encore être clarifiée. Aux associations de consommateurs de la faire préciser et de l’enrichir afin que soit garantie une distribution adaptée du crédit.

ID: 37479
Auteur(s): iff
Date de parution: 30/05/06
   
 

Created: 01/06/06. Last Changes: 01/06/06.
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